Un pas de plus vers la liberté

Quand j’ai décou­vert en 1999/2000 qu’un navi­ga­teur libre com­men­çait enfin à être uti­li­sable, j’é­tais vrai­ment impa­tient. Cela fai­sait déjà quelques temps que je sou­hai­tais uti­li­ser au maxi­mum des logi­ciels libres. J’a­vais natu­rel­le­ment équi­pé mon pre­mier ordi­na­teur du sys­tème d’ex­ploi­ta­tion GNU/Linux, et à la fac, nous reboo­tions nos machines sous GNU/Linux à chaque arri­vée dans les salles de TP. Mais voi­là, il n’exis­tait pas de navi­ga­teur libre digne de ce nom. L’ar­ri­vée de Mozilla fut donc un vrai bol d’air. Et ses pro­messes tech­niques annon­çaient un futur inté­res­sant pour la démo­cra­ti­sa­tion du Logi­ciel Libre.

C’est ain­si que petit à petit, ce logi­ciel a gran­dit en fia­bi­li­té, puis en popu­la­ri­té. J’ai uti­li­sé rapi­de­ment la suite mail+navigateur que pro­po­sait Mozilla. Puis j’ai sui­vi la dance, et quand Fire­fox est arri­vé, offrant une nou­velle jeu­nesse au mas­to­donte, je l’ai uti­li­sé, à côté de thun­der­bird pour les mails.

Mais si la libé­ra­tion du code source par Nets­cape avait été une bonne chose, je n’ai jamais vrai­ment appré­cié ce logi­ciel au delà de la tech­nique, et ce pour plu­sieurs raisons :

  • Son déve­lop­pe­ment était assez fer­mé. Bien sûr, comme tous les logi­ciels libres, il dis­po­sait d’un bug­tra­cker (le plus connu ayant été créé pour lui), son code était libre, et l’é­quipe accep­tait par­fois les idées d’a­mé­lio­ra­tion. Mais bien peu de per­sonnes hors des déve­lop­peurs Nets­cape ont réel­le­ment par­ti­ci­pé au pro­jet. Etrange non ?
  • Petit à petit, une équipe de promotion/marketing s’est créée autour de Mozilla, struc­tu­rée autour des fon­da­tions (mozilla foun­da­tion, mozilla foun­da­tion europe, etc). Rien à redire là-des­sus, cha­cun fait ce qu’il veut, et toute dif­fu­sion du Libre est béné­fique. Mais on a alors assis­té à des choses qui ont com­men­cé à me déplaire gran­de­ment : des coûts impor­tants de publi­ci­té, alors que la même chose inves­tie en déve­lop­pe­ment aurait per­mis d’é­normes amé­lio­ra­tions, des cam­pagnes de pro­mo­tion axées sur les aspects tech­niques du logi­ciel, et ne lais­sant aucune part à la com­mu­ni­ca­tion autour du Libre. Bref, on perd tout inté­rêt, car c’est juste faire décou­vrir aux gens un logi­ciel par­mis d’autres, et non une phi­lo­so­phie, une com­mu­nau­té, des idées, etc.
  • Dou­ce­ment, on a pu consta­ter que les déve­lop­peurs pri­vi­lé­giaient les amé­lio­ra­tions spé­ci­fiques à la ver­sion fonc­tion­nant sous Micro­soft Win­dows. En a ain­si résul­té sous cet OS une meilleure vélo­ci­té, une meilleur inté­gra­tion, etc.
  • Les logos de Mozilla n’ont pas été pla­cés sous licence libre, et pen­dant long­temps la fon­da­tion a inter­dit toute redis­tri­bu­tion de ces images avec des ver­sions modi­fiées de ses logi­ciels. Si l’on peut com­prendre l’i­dée de défendre une iden­ti­té, on frise ici plu­tôt la défense d’une marque de pro­prié­té. je trouve ça assez malsain.
  • Le pro­jet, d’a­bord struc­tu­ré sous forme de fon­da­tions s’est depuis quelques temps dotée d’une cor­po­ra­tion, à but lucra­tif elle. C’est la cor­po­ra­tion offi­cielle de Mozilla, et toute per­sonne fai­sant la pro­mo­tion de ces logi­ciels fait éga­le­ment de la pro­mo­tion pour cette cor­po­ra­tion à but lucratif.

Ces dif­fé­rents points ont long­temps été pour moi des épines dans le pied que j’ac­cèp­tais de sup­por­ter, car la solu­tion tech­nique que repré­sen­tait ces logi­ciels me conve­nait, et l’é­ti­quette Logi­ciel Libre asso­ciée suf­fi­sait à cal­mer mes craintes.

Et cette semaine j’ai fran­chit le pas : en deux soirs, j’ai migré mon navi­ga­teur web et mon client mail pour une solu­tion vrai­ment libre : le couple konqueror/kmail. Deux amis m’ont gran­de­ment faci­li­té la tâche. Romu pour ses démons­tra­tions enthou­siastes et kol­ter pour ses excel­lents conseils de migra­tion et de confi­gu­ra­tion ; je tiens à les remer­cier cha­leu­reu­se­ment. J’ai ain­si pu migrer 3Go de mails, et retrou­ver toutes mes habi­tudes (déve­lop­pe­ment web, onglets, chiffrement/signature des mails, anti-pub, etc).

Main­te­nant que j’ai fran­chi le pas, je me sens un peu plus libre !